17 September 2011

Libérez Ismaël! La manifestation des Péruviens au centre d’expulsion de Turin


C'est le drapeau péruvien en rouge et blanc qui s’agite devant le Cie de Turin, en Italie. Et les 40 personnes qui continuent à crier « Liberté! », sous la pluie, ce sont les amis d'Ismaël, le dernier arrivé au centre d'identification et d'expulsion de Turin. Son visage est connu au sein de la communauté péruvienne de la ville de Turin. Et aujourd'hui cela pourrait être la première d'une longue série de manifestations pour demander sa libération. A l’extérieur des murs du Cie il y a sa sœur Angy, les amis du centre culturel José Carlos Mariategui et les camarades de son parti, le Parti Nationaliste Péruvien de l’actuel président Ollanta Humala. Pour le soutenir il y a aussi des jeunes Italiens du mouvement No Cie. Pas même la pluie torrentielle les a arrêtés. Ils voulaient vraiment lui faire sentir leur présence. Et d'une certaine manière ils tenaient à éveiller la communauté péruvienne – et non seulement celle-ci – de l'engourdissement sur la question de l'expulsion.

Au-delà du mur, les détenus sentent tout de suite que dehors il y a quelque chose, un peu à cause de la musique à volume maximum en provenance des haut-parleurs de la camionnette, un peu à cause des appels du cœur en provenance du micro de Juan. Et quand le ciel donne un répit de la pluie, quelques détenus tunisiens montent sur les toits de la zone blanche pour saluer, les mains vers le ciel et les deux doigts ouverts en signe de victoire. Au même moment une colonne de fumée noire se lève de l’air violette, signe que quelque chose est en train de bruler, probablement juste un matelas en signe de protestation.

Peu après, la manifestation se termine avec la voix d'Ismaël. La radio est sur les fréquences de Radio Black Out qui, à ce moment-là, transmet un entretien téléphonique en direct avec lui. Amplifié à tout volume, sa voix sort du Cie et résonne dans les rues. Alors pour une fois, même les voisins peuvent entendre, malgré eux, une histoire à la première personne du Cie. Ils peuvent entendre aussi combien il est facile de perdre 18 mois de sa liberté dans l’Italie d’aujourd'hui.

Quand Ismaël a été arrêté, le 7 septembre, sur un poste de police le long de la rue, il conduisait sa fourgonnette avec laquelle il travaillait à un déménagement depuis quelques jours. Vos papiers, s'il vous plaît. Mais il n’en avait pas. Pourtant, en Italie il y est depuis dix ans, dix ans de travail dur pour maintenir sa femme et son enfant au Pérou. D'abord en tant que maçon, puis comme peintre en bâtiment, et maintenant dans les déménagements. Mais en Italie, on le sait trop bien, un emploi ne suffit pas pour obtenir un permis de séjour. Il a essayé deux fois d’avoir ses papiers, toujours avec les décrets des flux, mais à chaque fois il y avait quelque chose qui n'allait pas. Voilà comment ils l'ont emmené, avec ses vêtements de travail et sans même le savoir il s’est retrouvé au centre d'identification et d'expulsion (Cie) de Turin. Où hier il a été transféré dans une cellule d'isolement, après avoir été victime d'une attaque non justifiée par des prisonniers de sa section.

Quelques heures après la manifestation, les photos de l'événement étaient déjà en ligne. Le cercle péruvien Mariatégui les a publiées sur sa page Facebook, qui compte plus de 1800 amis, avec un flyer pour la libération d'Ismaël. Et avec ce commentaire:

“AYER SE INIZIO LA PRIMERA BATALLA POR LA LIBERAZION DE UN PERUANO HONESTO Y TRABAJADOR DETENIDO EN ITALIA TURÌN POR SER INDOCUMENTADO... ES UN PERUANO K APOYA A SU HERMANA Y A SUS SOBRINO QUE ESTAN EN ITALIA Y TIENE QUE ALIMENTAR A SU POBRE HIJO K ESTA EN EL PERù... BASTA YA DE SOPORTAR TANTAS INJUSTICIAS COMETIDOS A LOS PERUANOS EN EL EXTERIOR, AQUì IN ITALIA EL EMBAJADOR Y EL CONSUL PERUANO BIEN GRACIAS PARA ELLOS "AQUI NO PASA NADA", COMO SIEMPRE INDIFERENTE, PERO SIEMPRE HEMOS TENIDO EL APOYO DEL PUEBLO Y ASOCIACIONES ITALIANAS QUE ESTUBIERòN CON NOSOTROS AYER , EN UN DìA DE TANTA LLUVìA NO LOS DETUVO PARA NADA ENTRARON EN CALOR , AGITANDO LA BANDERA DEL PERù Y PIDIENDO LA LIBERACION DEL PERUANO ISMAEL. SEGUIREMOS LUCHANDO POR UN MUNDO LIBRE ì BASTA DE INJUSTICIA !!!!!!!!!!”

Tout indique qu'il y aura d'autres initiatives similaires dans les prochaines semaines. Il reste, toutefois, l'importance d'une première. Jamais auparavant une communauté d'amis, avec les membres de la famille d'un détenu dans un Cie, avait réussi à organiser de manière indépendante une manifestation publique pour demander sa libération.

Pensez à ce qui se passerait si pour chacun des détenus des Cie, le circuit de ses proches s’organisait pour préparer une manifestation. C'est peut-être la même question qui se pose aux agents de la Digos (services de renseignement des carabiniers et de la police) qui de l'autre côté de la rue, en face de l'ancienne entrée du CIE, regardent avec étonnement la manifestation.

Pourtant, ce n'est pas une hypothèse impossible. Parce qu'il est vrai que l’année 2011 a été caractérisée par la présence de nombreux Tunisiens enfermés dans les Cie juste après leur débarquement à Lampedusa et qui en Italie n’avaient pratiquement personne. Mais il est également vrai que, après l'été, les débarquements en provenance de la Tunisie vont cesser ou au moins diminuer de façon uniforme, alors les raids et les arrestations dans nos villes reprendront. Et les Cie retourneront à être rempli d’ « Italiens-entre-guillemets », des gens qui ont passé une vie en Italie, et qui ici ont une femme et des enfants. Alors des manifestations telles que celle pour Ismaël pourraient devenir la norme.

PS: Ismaël a été expulsé au debut d'Octobre 2011

traduit par Veronic Algeri